Le rapport de la concertation sur la démocratie médico-sociale et le CVS a fait l'objet d'un article porteur sur le Géronto News du 8 février. En voici le texte :
"FHF, Fehap, Fnadepa, Fnaqpa, Uniopss, mais aussi une myriade d'associations d'usagers ont mené un gros travail de concertation pour clarifier et améliorer le décret portant le CVS "nouvelle génération". Au-delà, elles veulent revivifier les espaces de dialogue dans les établissements et services pour personnes âgées.
Chose assez rare pour être soulignée, de nombreuses fédérations du secteur du grand âge se sont réunies pour muscler la démocratie sanitaire dans le champ médico-social et mieux faire entendre la voix des usagers.
Tout est parti du décret d'avril 2022 venant toiletter les conseils de vie sociale (CVS) au 1er janvier 2023, date à laquelle les directeurs d'Ehpad doivent mettre en oeuvre les nouvelles modalités.
Or, différents acteurs ont fait entendre leur voix en fin d'année dernière, s'alarmant de dispositions peu claires et/ou inabouties.
D'abord sous la forme d'une tribune diffusée fin septembre par Séverine Laboue, directrice du groupe hospitalier à profil gériatrique Loos-Haubourdin (Nord), Joseph Krummenaecker et Pascal Le Bihanic, consultants et membres de la Fédération nationale des associations et amis des personnes âgées (Fnapaef).
Puis, différentes organisations "Inter-CVS" ont émis une déclaration commune en octobre, qui pointe également des "incertitudes" et un besoin d'enrichissement du décret.
Enfin, fin novembre, c'est le Groupement des animateurs en gérontologie (GAG) qui a tempêté auprès de Gerontonews sur "l'insuffisance" du texte.
Ces sons de cloche convergents ont mené à une vaste concertation en distanciel "sur l'évolution de la démocratie médico-sociale et du CVS", organisée le 16 décembre 2022 par Joseph Krummenacker et Pascal Le Bihanic, sous la casquette de "consultants-formateurs".
Elle a associé la Fnapaef, Séverine Laboue, la Fédération hospitalière de France (FHF), la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (Fehap), la Fédération nationale des directeurs d'établissements et services pour personnes âgées (Fnadepa), la Fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées (Fnaqpa), l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss), le GAG, les Inter-CVS de l'Essonne, du Nord et des Deux-Sèvres, le conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie des Deux-Sèvres, le CVS Part'âge, l'Observatoire du grand âge (Ogra) et le média Age Village.
Contacté par Gerontonews ce 8 février, Pascal Le Bihanic a indiqué que le Syndicat national des établissements et résidences privées pour personnes âgées (Synerpa) n'avait pas été associé à ce stade en raison de l'affaire Orpea. "Il a certainement une position intéressante, mais on a voulu se limiter aux secteurs public et non lucratif", a-t-il justifié.
"Que la loi 2002-2 poursuive son chemin"
L'objectif de la réunion du 16 décembre était de "mutualiser un ensemble de préconisations concrètes et argumentées" afin de "faire évoluer positivement la démocratie médico-sociale et le CVS", est-il écrit dans l'épais document de synthèse transmis à Gerontonews, qui a été produit après deux autres réunions ayant permis de faire remonter "quelque 150 constats ou préconisations".
"Nous sommes dans la configuration d'une démarche de groupe avec une question qui pourrait figurer à l'ordre du jour d'un CVS ou d'une autre forme de participation", résument-ils dans le document. "Que voulons-nous conserver dans le dispositif démocratique tel qu'il est actuellement et quelles sont nos préconisations pour le faire progresser dans le sens du bien partagé?"
Concernant la "démocratie", les membres de la concertation "souhaitent fortement que la loi dite '2002-2' portant rénovation de l'action sociale et médico-sociale, avec ses outils, dont la pièce maîtresse est le CVS, soit conservée et poursuive son chemin".
Autrement dit, "non seulement que la démocratie médico-sociale et ses outils soient conservés, mais qu'ils soient développés. Il est possible notamment de généraliser le CVS à tous les types d'établissements et services hors ESSMS [établissements et services sociaux et médico-sociaux], y compris dans ceux où la durée d'accompagnement est inférieure à un an. La démocratie médico-sociale gagne à être exercée partout, dans les Ssad [services d'aide et d'accompagnement à domicile], les Ssiad [services de soins infirmiers à domicile] et les Spasad [services polyvalents d'aide et de soins à domicile]", suggèrent-ils.
"Et puisqu'il s'agit très généralement d'un parcours qui se déroule entre le domicile, le sanitaire et le médico-social, il importe d'inscrire dans le fonctionnement global de l'institution les interactions entre ces trois sphères", ajoutent-ils.
"La composition du CVS" au coeur des préoccupations
Les membres de la concertation se focalisent ensuite sur le CVS proprement dit et sur le décret d'avril 2022, en saluant les avancées et en pointant des "zones d'ombre" et des risques de dérives.
Le sujet de la composition du CVS est celui "qui a recueilli le plus d'observations de la part des participants", font-ils remarquer.
Par exemple, le décret "subordonne désormais la présence" du collège des familles ou des proches aidants à "'la nature de l'établissement ou du service' alors que les représentants des familles se trouvaient auparavant dans le socle du CVS". Ils demandent donc "de préciser très clairement les types d'ESMS [établissements et services médico-sociaux] où ce collège est obligatoire afin d'éviter toute ambiguïté".
Par ailleurs, ils estiment que "le nombre de représentants des familles et des proches limité à un est majoritairement jugé trop faible, considérant l'importance des troubles cognitifs affectant, par exemple, les personnes accueillies en Ehpad".
Un autre questionnement porte sur "le représentant du groupement des personnes accompagnées": "il convient de préciser la nature dudit groupement. S'agit-il d'une association déclarée et agréée sachant qu'il n'existe pas d'agrément pour le secteur médico-social ou bien s'agit-il d'un groupement membre du CDCA ou d'un représentant d'un inter-CVS ou autre?", s'interrogent les membres de la concertation.
L'arrivée au sein du CVS d'un "représentant de l'équipe médico-soignante" fait aussi tiquer. Outre le fait que le décret ne précise pas les modalités de représentation, les membres de la concertation font remarquer que "cette appellation singulière tranche avec la nature médico-sociale des établissements visés par le décret" et que "des interrogations subsistent concernant l'éligibilité (ou la désignation) des salariés faisant fonction, des personnes à temps partiel", ou encore "ceux en CDD long".
Pour ce qui est de la participation "de représentants externes à l'établissement", ils émettent "une réserve concernant les élus locaux déjà présents au sein des conseils de surveillance et d'administration des établissements publics avec un risque de politisation des débats lors d'enjeux électoraux locaux" et ils déplorent "l'absence de représentants du personnel psychosocial".
Les membres émettent ensuite diverses recommandations sur "les attributions" du CVS, par exemple "sanctuariser l'obligation de consultation du CVS en cas de restrictions des droits et libertés tels qu'apparus durant le Covid préalablement à l'élaboration des protocoles de visite".
Ils suggèrent aussi de financer "la formation" des membres des CVS et d'ajouter "une brochure nationale d'information au livret d'accueil".
Jean-Christophe Combe interpellé pour obtenir "des instructions" claires
À la fin du document, les participants détaillent quatre "bonnes pratiques" dans divers CVS et se disent " prêts à s'investir dans la construction et la mise en place des améliorations souhaitées".
Pascal Le Bihanic a indiqué à Gerontonews ce 8 février avoir adressé le document début février au ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, après avoir rencontré ses deux conseillères Pauline Sassard -sur l'autonomie- et Alice Casagrande -chargée de la lutte contre la maltraitance- le 20 décembre.
"On a mis un pied dans la porte. Le sujet, ce sont les conditions du dialogue à améliorer, le CVS peut par exemple être vu comme un acteur de prévention de la maltraitance", a fait valoir le consultant.
"L'urgence est de rendre ce décret applicable. On ne demande pas un nouveau décret mais a minima des instructions sur des points précis [restés flous]", a-t-il précisé."
Par Claire Beziau journaliste à Géronto News
Comentarios